jeudi 20 mars 2014

Le printemps , la nature, la musique et l'amour : Werther






Werther
         (au paysan)
         Alors, c’est bien ici la maison du Bailli ?
         (congédiant son guide)
         Merci.
         (seul, Werther pénètre plus avant dans la cour et s’arrête devant la fontaine.)
         Je ne sais si je veille ou si je rêve encore !
         Tout ce qui m’environne a l’air d’un paradis ;
         le bois soupire ainsi qu’une harpe sonore,
         Un monde se révèle à mes yeux éblouis !
         O nature, pleine de grâce,
         Reine du temps et de l’espace
         Daigne accueillir celui qui passe et te salue,
         Humble mortel !
         Mystérieux silence !
         O calme solennel !
         Tout m’attire et me plaît !
         Ce mur, et ce coin sombre...
         Cette source limpide et la fraîcheur de l’ombre ;
         il n’est pas une haie, il n’est pas un buisson où
         n’éclose une fleur,
         où ne passe un frisson !
         O nature! enivre-moi de parfums,
         Mère éternellement jeune, adorable et pure !
         O nature !
         Et toi, soleil, viens m’inonder de tes rayons !  

 


Werther
         (d’une voix entrecoupée sans presque regarder Charlotte; douloureusement)
         Oui ! c’est moi ! je reviens ! et pourtant...
         loin de vous... je n’ai pas laissé passer une heure...
         un instant... sans dire:
         que je meure plutôt que la revoir !
         Puis... lorsque vint le jour que vous aviez fixé...
         pour le retour... je suis parti !
         Sur le seuil de la porte... je résistais encor... je voulais fuir !
         (sans accent)
         Qu’importe d’ailleurs tout cela !
         (accablé)
         Me voici!
        
         Charlotte
         (très émue, cherchant à se contenir et à paraître indifférente)
         Pourquoi cette parole amère? Pourquoi ne plus revenir ?
         Quant ici chacun vous attendait... mon père... les enfants !
        
         Werther
         (s’approchant avec une curiosité expressive)
         Et vous ? Vous aussi ?
        
         Charlotte
         (coupant court aux mots qu’elle sent sur les lèvres de Werther et sans lui répondre)
         Voyez! la maison est restée telle que vous l’aviez quittée !
         A la revoir ainsi
         (tendrement)
         ne vous semble-t-il pas qu’elle s’est souvenue ?
        
         Werther
         (jetant un regard autour de lui)
         Oui, je vois... ici rien n’a changé...
         (tristement)
         que les cœurs! Toute chose est encore à la place connue !
        
         Charlotte
         (tendrement et simplement)
         Toute chose est encore à la place connue !
        
         Werther
         (va par la chambre)
         Voici le clavecin qui chantait mes bonheurs
         Ou qui tressaillait de ma peine.
         Alors que votre voix accompagnait la mienne !
        
         Werther
         (venant près de la table)
         Ces livres ! sur qui tant de fois
         nous avons incliné nos têtes rapprochées!
         (Allant au secrétaire sur leque est placée la boîte aux pistolets)
         Et ces armes... Un jour ma main les a touchées...
         (d’une voix sourde)
         déjà j’étais impatient du long repos auquel j’aspire!
        
         Charlotte
         (sans voir ce dernier mouvement, est remontée vers le clavecin sur lequel elle a pris  un manuscrit; puis elle redescend vers Werther)
         Et voici ces vers d’Ossian que vous aviez commencé de traduire...
        
         Werther
         (prenant le manuscrit)
         Traduire ! Ah ! bien souvent mon rêve s’envola sur l’aile
         de ces vers, et c’est toi, cher poète,
         qui bien plutôt était mon interprète !
         (avec une tristesse inspirée)
         Toute mon âme est là !
         Pourquoi me réveiller, ô souffle du printemps,
         pourquoi me réveiller ?
         Sur mon front je sens tes caresses,
         Et pourtant bien proche est le temps
         Des orages et des tristesses !
         (avec désespérance)
         Pourquoi me réveiller, ô souffle du printemps ?
         Demain dans le vallon viendra le voyageur
         Se souvenant de ma gloire première...
         Et ses yeux vainement chercheront ma splendeur,
         Ils ne trouveront plus que deuil et que misère !
         Hélas!
         (avec désespérance)
         Pourquoi me réveiller ô souffle du printemps !
        
         Charlotte
         (dans le plus grand trouble)
         N’achevez pas ! Hélas ! ce désespoir...
         ce deuil... on dirait... il me semble...
        
         Werther
         Ciel ! Ai-je compris ?
         (plus accentué)
         Ai-je compris ?
         (palpitant)
         Dans cette voix qui tremble, dans ces doux yeux remplis
         de larmes n’est-ce pas un aveu que je lis ?
        
         Charlotte
         (frémissante)
         Ah! taisez-vous !
        
         Werther
         (en s’exaltant de plus en plus)
         A quoi bon essayer de nous tromper encore...
        
         Charlotte
         (suppliant)
         Je vous implore !
        
         Werther
         (avec ardeur)
         Va! nous mentions tous deux en nous disant vainqueurs
         de l’immortel amour qui tressaille en nos cœurs !
        
         Charlotte
         Werther !
        
         Werther
         (extasié et palpitant)
         Ah! ce premier baiser, mon rêve et mon envie !
         Bonheur tant espéré qu’aujourd’hui j’entrevois !
         Il brûle sur ma lèvre encor inassouvie ce baiser...
         ce baiser demandé pour la première fois !
        
         Charlotte
         (défaillante, tombe éperdue sur la canapé)
         Ah! Ma raison s’égare...
        
         Werther
         (se jetant à ses pieds)
         Tu m’aimes ! tu m’aimes ! tu m’aimes !





Choix des textes sur le thème du printemps qui arrive aujourd'hui 20 mars 2014.

Vous trouverez le texte dans sa totalité sur Libretti.

à l'occasion de la répétition générale, Werther sera joué 
demain vendredi 21 mars, dimanche 23 et mardi 25 mars 2014 !


Merci pour la découverte !


6 commentaires:

  1. Argh, ça c'est du texte! Je rigole, mais si Saint Etienne n'était pas si loin...

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    1. Coucou Keisha,
      le texte n'est jamais très gai dans les opéras. Mais j'ai bien aimé ces deux airs et quelques autres dont deux pas du tout marrants :-S
      L'Opéra théâtre de ma ville est un beau lieu !
      Bisous et bon WE

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  2. Il est bien vrai que dans ces jours bénis par le Printemps , la nature est pleine de grâces...:-)
    Bisous soleil du jour Didi

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    1. Bonsoir Mathilde,
      j'ai trouvé que ce texte était un bien bel hommage à dame nature ♥
      Bisous pour ce WE où le soleil semble être un peu fatigué.... :-S

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  3. Joli choix ! Merci pour le partage

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    1. Bonjour :)
      De rien pour le partage ce n'est que quelques extraits qui m'ont marqués !
      Bisous et bon WE

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