mardi 29 décembre 2015

Les poissons ne ferment pas les yeux Erri De Luca


«À dix ans, on est dans une enveloppe contenant toutes les formes futures. On regarde à l'extérieur en adultes présumés, mais à l'étroit dans une pointure de souliers plus petite.»

Comme chaque été, le narrateur descend de Naples pour passer l'été sur l'île. Il y retrouve le monde des pêcheurs et les plaisirs de la mer mais ne peut échapper à la mutation débutée avec son dixième anniversaire. Une fillette fait irruption sur la plage et, avec elle, trois garçons jaloux. De quoi remettre en question son ignorance du verbe aimer et sa vision de la justice.

Erri De Luca nous offre ici le récit envoûtant des mues de l'enfance. Source Gallimard Folio

Mon avis : 

Une lecture magnifique poétique et nostalgique.

Une écriture faite d'impressions lumineuses comme le soleil en été. 

En septembre, on peut avoir des jours de ciel descendu à terra. Le pont-levis de son château en l'air se baisse et, glissant le long d'un escalier bleu, le ciel vient se poser un moment au sol. A dix ans, j'arrivais à voir les marches carrées que je pouvais remonter du regard. Aujourd'hui je me contente de les avoir vues et de croire qu'elles y sont toujours.  

Un parfum d'enfance et le dur passage à l'âge adulte.

Il nous écrit de là-bas ? Qu'est-ce qu'il raconte ? 
- Il est allé voir Guernica, le tableau de ...
- Je sais , raconte, ne perds pas de temps. " 
Moi je trouvais que nous en avions à revendre, que nous pouvions en offrir à ceux qui étaient près de leur fin. Tu parles ! Peut-on faire un paquet avec du temps à l'intérieur et l'offrir pour Noël ? J'en avais plein, le mien et en plus celui qui était dans les livres. Mais c'est elle qui devait avoir raison, elle et les animaux, il ne fallait pas perdre de temps. Celui qui nous est imparti dure autant que celui qui n'est pas gaspillé, le reste est perdu. (page 33)


Comme une blessure, comme une mue, comme un corps qui ne suit pas, qui ne sait pas quoi faire.

Je le rencontre dans mon sommeil, où je pleure sans larmes. le deuil de mon père est une flaque d'eau de mer asséchée. Au pilieu des rochers, il reste le sel séché, des sanglots à sec.
Je retrouve à présent mes larmes d'il y a cinquante ans. Elles reviennent à mes yeux après avoir voyagé et fait partie du goutte-à-goutte des yeux du monde. Elles sont revenues au point de départ et je les pleure de nouveau. La fenêtre disloquée par des décennies d'intempéries que je brûle dans la cheminée me suffit. des mains que je ne peux plus toucher l'ont ouverte et refermée. Pourtant, je les vois, veines, tendons, forme des ongles, remuer dans l'air de la maison et s'affairer.
Les larmes reviennent bras dessus bras dessous, deux par deux, se penchent sur le bord et plongent des cils sur mon pantalon, tandis que je pose mon front sur mes mains vides. ce sont les mêmes larmes d'enfant, d'ancienne impuissance. Elles n'ont rien demandées et cessent toutes seules. (page 97)


Une très belle lecture dont les mots résonnent en moi et les images et sensations me submergent et me font scintiller des yeux comme les écailles des poissons au soleil...

Un petit livre par sa taille mais assurément un grand livre !

J'ai aimé, beaucoup, passionnément, à la folie !  Grazie ♥

"Les livres sont la plus forte contradiction des barreaux. 
Ils ouvrent le plafond de la cellule du prisonnier allongé sur son lit." 

@Elena Vizerskaya


jeudi 24 décembre 2015

samedi 19 décembre 2015

Les insurrections singulières de Jeanne Benameur



Au seuil de la quarantaine, ouvrier au trajet atypique, décalé à l’usine comme parmi les siens, Antoine flotte dans sa peau et son identité, à la recherche d’une place dans le monde. Entre vertiges d’une rupture amoureuse et limites du militantisme syndical face à la mondialisation, il lui faudra se risquer au plus profond de lui-même pour découvrir une force nouvelle, reprendre les commandes de sa vie.
Parcours de lutte et de rébellion, plongée au coeur de l’héritage familial, aventure politique intime et chronique d’une rédemption amoureuse, Les Insurrections singulières est un roman des corps en mouvement, un voyage initiatique qui nous entraîne jusqu’au Brésil.
Dans une prose sobre et attentive, au plus près de ses personnages, Jeanne Benameur signe une ode à l’élan de vivre, une invitation à chercher sa liberté dans la communauté des hommes, à prendre son destin à bras-le-corps. Parce que les révolutions sont d’abord intérieures. Et parce que “on n’a pas l’éternité devant nous. Juste la vie”. Source site Actes Sud éditions

Mon avis : 

je lis je lis et je ne suis pas le rythme ici ... Je vais néanmoins essayer de profiter de mes vacances pour combler mon retard de billets lecture.

Ce livre je l'ai depuis longtemps dans ma bibliothèque, je l'avais acheté en occasion à la librairie Gibert à Sainté alors ça remonte loin, 2011 ! 

J'adore cette couverture cet élan vers l'avenir, sa couleur pétillante !

A l'époque et sur les blogs je vois bien que cette auteure attire et elle attire des lecteurs tenant des blogs que je suis avec plaisir.


Je comptais bien rencontrer l'auteur et aussi me procurer un autre livre : ce sera Profanes. 
J'aurais pu prendre également Otages intimes dont j'ai entendu énormément de bien (merci Elsa). Ce sera pour plus tard, je prends souvent des  versions poches, budget oblige.

Jeanne Benameur est à l'écoute de ses lecteurs. Je fais preuve de curiosités en écoutant les échanges entre elle et ses lecteurs et lectrices malgré une cohue intense qui gâche un peu la rencontre (ça pousse à  l'arrière et l'angle du grand chapiteau est plein à craquer, le chef Gagnaire dédicace à l'arrière).

 
@Didi octobre 2015
 
 
J'ai une belle Didicace !



Ce livre c'est la quête d'un homme durant sa vie.

Antoine est issu d'une famille d'ouvriers et il est devenu lui aussi un ouvrier. Sa vie va vite devenir suffocante.

Alors quand l'usine dans laquelle il travaille va être délocalisée, Antoine va se trouver en face de lui-même. Quitté par sa petite amie Karima, la quête d'Antoine sera pour le travail mais surtout et avant tout personnelle. 

Que faire de sa vie ? Comment la remplir, pour que ces riens se remplissent. 

Un retour dans sa famille , chez ses parents, puis des rencontres vont le conduire loin ! Loin aussi bien physiquement que psychologiquement !

Marcel l'ami de ses parents, bouquiniste philosophe va lui ouvrir le chemin de l'aventure et de la liberté.

" J'apprenais à le connaitre. A travers sa maison.
Mais ce qui la faisait vraiment sienne c'est qu'elle était envahie de livres. De sa chambre au grenier. Même dans la cuisine où on passait le plus clair de notre temps, des piles de livres voisinaient avec les épices sur le buffet, sur les chaises, partout. 
Les livres chez lui c'est une présence tranquille, pas comme chez Karima où les étagères bien rangées me narguaient? Chez Marcel, on aurait dit que les livres attendaient avec nonchalance qu'on les ouvre. Ils étaient là, disponibles, sans exigence. "

Il y a Jean de Montolade, le lien dans le temps et l'espace entre le Brésil et la France. 

Et il y a Thais, la belle Thais qui lui permettra de devenir un autre, plus proches de ses envies et de ses désirs. 

Ce livre m'a touchée dans ce qu'il nous rappelle. Vivre nos désirs ! 

" J'ai toujours aimé les fous, Antoine. Les décalés, c'est les seuls qui lui laissent la place, au désir. Dans le décalage, c'est là. je me méfie des gens trop installés, riches ou pauvres, dans leur peau, garantie cent pour cent tranquilles. j'aime pas les cimetières ambulants. La moitié des gens sont déjà morts. " 

Pour ma part, il m'incite à essayer de réaliser mes insurrections singulières...  

C'est loin d'être toujours une évidence de vouloir faire ce qui nous plaît, ce n'est pas toujours facile mais c'est une liberté qu'il est bon de savoir s'offrir. Vivre ses rêves voilà un bel objectif vers lequel tendre.

L'écriture de Jeanne Benameur est précise, concise, elle ne s'encombre pas de mots. Elle va à l'essentiel.

Ce livre parle aussi de la place des livres dans nos vies et de celle de l'écriture. Les petits carnets du père d'Antoine m'ont émue. Ils sont le déclencheur d'écriture et de la prise de conscience d'Antoine de s'emparer de sa vie.

Un livre qui nous donne à réfléchir sur nous même.
Des insurrections singulières à créer !
Une lecture qui a résonné de façon très intime sur mon propre parcours.



Merci Madame Benameur pour cette lecture, 
Invitation à la liberté d'être.

Découvrir cet auteur sur Babelio.com

Au plaisir de vous lire encore ♥



jeudi 10 décembre 2015

Le Teckel de Hervé Bourhis





"Pour vendre ce nouveau produit à nos partenaires médecins, nous allons allier l'expérience à la fraîcheur". Ainsi la direction des laboratoires Duprat s'adresse-t-elle à son nouveau binôme commercial pour le convaincre d'accepter une collaboration en réalité imposée. Guy Farkas, surnommé "Le Teckel", visiteur médical revenu de tout, devra faire équipe avec Jérémy Labionda, jeune cadre surdiplômé, en fait discrètement mandaté par sa hiérarchie pour enquêter sur les véritables agissements du Teckel. Bref, le mariage de la carpe et du lapin sur fond de mission à haut risque, puisqu'ils doivent vendre la nouvelle version d'un médicament soupçonné d'avoir provoqué des centaines de décès.
Cruel souvent, cynique parfois, mais d'un bout à l'autre extrêmement drôle, Le Teckel est une satire féroce de notre monde avide et amoral. C'est une grande histoire d'amitié, un brûlot anticapitaliste, une passion interdite, un thriller haletant! N'ayons pas peur des mots: c'est un road trip à la française en CX break, entre Tandem et Les Galettes de Pont-Aven!
Hervé Bourhis réussit en outre une galerie de portraits humains très finement observés, qui jusqu'au bout réserveront des surprises… Un sans-faute.

Mon avis : 

Comme indiqué précédemment sur mon billet de Terminus Belz mon partenariat Babelio Prix SCNF du polar 2016 était doté d'une BD que je devais choisir dans une liste préselectionnée.

Après avoir hésité devant cette sélection, je me suis décidée pour "Le Teckel" , satire féroce, road trip, thriller haletant annoncés, je me suis donc lancée...

Autant dire tout de suite, que cette BD ne m'a pas plu ...  Je n'ai pas accroché... Et me voilà bien bête pour vous expliquer pourquoi...

Enfin je vais essayer d'en dire un peu plus : Tout d'abord je m'attendais à rire un peu ... ce ne fût pas le cas... 

De plus dans une BD, je m'attends souvent à être attirée et comblée par le dessins et les couleurs, et là, et bien je n'ai pas adhéré, ni aux traits des personnages et décors ni aux couleurs...

L'histoire débute peut être seulement, car j'ai cru comprendre que cette BD a plusieurs tomes et qu'à la base, ce personnage et cette histoire ont été créés sur le blog de l'auteur, ce qui explique peut être l'effet décousu que j'ai ressenti...

Hélas j'avoue également que je n'ai pas vraiment envie d'en savoir plus sur les personnages. Je trouve que l'histoire peine à trouver son rythme et son intrigue est menue et pas très apparente.

Une déception que cette lecture ...

J'en suis bien désolée, c'est peut être au fond, 
parce que je n'aime pas trop les chiens... 

Wouarf ! J'abandonne le Teckel ...



Mais  je remercie très chaleureusement et respectueusement :

Babelio qui me gâte très souvent, j'ai été retenue pour une BD mardi dernier ! 
Ouf mon billet est édité à zéro jour de retard :O)


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la SNCF qui me transporte chaque jours de semaine au travail 



et également les Éditions du Professeur Cyclope (qui m'offre une lecture numérique que je n'ai pas encore visionnée !  )

Sortie de USINE À GAZ 

dimanche 6 décembre 2015

Terminus Belz d'Emmanuel Grand

Il s'appelle Marko Voronine. Il est en danger. La mafia le poursuit.
Il croit trouver refuge sur Belz, une petite île bretonne au large de Lorient coupée de tout sauf du vent. Mais quand le jeune Ukrainien débarque du ferry, l'accueil est plutôt rude. Le métier du grand large en a pris un coup, l'embauche est rare sur les chalutiers et les marins rechignent à céder la place à un étranger. Et puis de curieuses histoires agitent en secret ce port de carte postale que les locaux appellent "l'ile des fous". Les hommes d'ici redoutent par dessus tout les signes de l'Ankou, l'ange de la mort, et pur Marko, les vieilles légendes peuvent se montrer aussi redoutables que les flingues de quelques tueurs roumains.

Tricotant avec brio un huis clos inquiétant et une course poursuite haletante, Emmanuel Grand mène son thriller d'est en ouest à un train d'enfer.

Mon avis : 

Partenariat BABELIO - SNCF, j'ai eu le plaisir d'être sélectionnée !

J'emprunte ma ligne SNCF depuis plus d'un an maintenant et c'est un joli cadeau de lecture de leur part, ça ne se refuse pas, surtout avec les quelques problèmes de trains au mois de novembre... Mais bon, chut, revenons à ce partenariat qui m'a offert un roman celui dont je vais parler ici et une BD que je chroniquerais plus tard.



On plonge dans ce polar comme on plonge  en enfer ! Marko, jeune Roumain fuit son pays. Clandestin à la merci de passeurs non scrupuleux son passage pour la France va très vite tourner au cauchemar !

Marko et ses compagnons de galère vont alors devoir tuer pour survivre et fuir !!!! A ce moment là, la mafia roumaine va n'avoir de cesse de retrouver les passagers justiciers pour se venger !

Les clandestins se séparent à l'arrivée en France et c'est Marko que l'on va suivre plus particulièrement. Celui-ci pour se fondre dans le paysage va se chercher du travail loin du continent sur l'île des fous, Belz ! 
Il se fait passer pour un pêcheur lui qui n'est même pas un marin d 'eau douce pour aller travailler sur l'île... Il se croit à l'abri sur cette île mais finalement le danger va être encore plus présent !

Ce livre est un savant mélange de modernité et de croyances bretonnes ! 

En cela Emmanuel Grand a su captiver mon attention. L'auteur alterne entre des chapitres consacrés à la vie sur l'île et ses fameuses légendes et la traque de la mafia sur le continent.

Marko est un homme attachant et on espère pour lui que sa situation va s'arranger. 

Des personnages hauts en couleurs de Dragos le tueur fou à Papou l'îlien pétrit de croyances bretonnes. 

Si j'ai aimé le déroulement de cette histoire et l'écriture de l'écrivain ayant savamment mixé modernité et traditions, j'ai été moins convaincue par le dénouement et ses explications un peu trop tarabiscotées à mon goût. 

Au final, une bonne lecture qui m'a embarquée entre réalité et cauchemars sur une île bretonne. 

Des personnages hauts en couleurs de Dragos le tueur fou à Papou l'îlien ancien pêcheur pétrit de croyances bretonnes. 

Et surtout l'Ankou... Finalement peut être le personnage principal de ce roman...

" Les ronces lui attrapaient maintenant les deux bras, à droite, à gauche. Il lui fallait courir au milieu du chemin dans la boue et dans les flaques. Marko courait. Ça giclait autour de lui, comme si les arbres et les buissons lui crachaient à la figure. Il se débattait, son dos était couvert de sueur. Il respirait fort et des éclaboussures lui entraient dans la bouche. Il fallait donner des coudes. Se battre contre la végétation qu se refermait sur lui. Marko donnait des coups de bâton, comme un fou. Puis soudain, l'étreinte des buissons se desserra. Le chemin s'ouvrit ; c'était du moins son impression car il faisait aussi noir que dans une tombe. Il glissa. Ses mains plongèrent dans la boue et quand il se releva, la silhouette se tanait devant lui, à un jet de pierre, immense. Elle le regardait des ses yeux brûlants comme deux tisons de braise. Marko était pétrifié. Il se retourna. Derrière lui, le sentier avait disparu. A sa place une muraille de ronces lui barrait la route. "

Merci à Babelio et à la SNCF pour ce partenariat !

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