Ce monde ne sera guéri que lorsque les victimes seront nos Rois.Mon avis :
Je me suis toujours demandé ce que je ferais si quelqu'un attentait à l'un de mes enfants. Quel père alors je serais. Quelle force, quelle faiblesse. Et tandis que je cherchais la réponse, une autre question a surgi : sommes-nous capables de protéger nos fils ? Grégoire Delacourt
Une lecture comme un cri, une lecture qui crache l'abject ! Une lecture empruntée à la bibliothèque de ma meilleure amie.
Craignant de commencer ce livre mais voulant aussi le lire, j'ai été finalement vite harponnée par cet écrit.
On sent dans cette histoire toute la détresse d'un homme, un père qui a dû gérer et encaisser l'indicible que son fils Benjamin a subi de la part d'un Prêtre.
Stupéfaction et violence, réactivité à se faire justice. Tout m'a profondément touché dans ce livre ...
" Mais le justice n'est pas faite pour les victimes. La justice n'est pas ce qui est juste. Elle ne répare pas. Elle n'a pas d'enfants. "
L'histoire est placée dans le milieu religieux. Les réactions de ce père (sans le P majuscule) Edouard se comprennent. J'étais à ses côtés. Lui qui voulait entendre à s'en arracher le cœur ce que son fils a subi.
" Je ne sais pas pourquoi je veux entendre cela. Recevoir chaque mot comme un coup de couteau dans le ventre, au visage et dans le cœur.Laisser chacune de ses phrases me saigner comme un port, me vider de mes larmes. Je veux tous ses mots afin de circonscrire le champ de l'horreur. Pour ne plus avoir d'ombres à imaginer, plus d'obscurités à redouter. Je ne veux nul recoin possible? Nulle pierre sous laquelle pourrait encore se cacher un lambeau de peau, une rognure d'ongle, une trace de sperme. le moindre soupir. la moindre langue. je veux jusqu'à son dernier mot, comme on extorque un dernier souffle.
"Toi, Delaunoy, ogre des aulnes, mon couteau va te pénétré comme tu as pénétré mon fils, te déchirer le ventre comme tu as déchiré le sien. Le mal que tu lui as fait doit t'être rendu car la justice est l'équilibre. Elle ne peut être que le contrepoids du mal - faute de quoi elle ferait des victimes des errants sur la Terre."
Car le silence dans ces situations est bien le plus destructeur et le plus violent de tout. Pour les victimes et les personnes autour qui très souvent ne voient rien... Ne peuvent en vérité imaginer pareilles violences.
Oui, comment imaginer ce pire, comment, après la stupéfaction gérer tout ce que ça engendre ? ...
Un revirement en toute fin se trouve là comme pour nous inquiéter davantage de la gestion de toutes ses affaires au sein de l'Eglise. Mais ce revirement nous donne également à réfléchir sur les différentes personnes œuvrant au sein de l'Eglise ... L'écrivain en faisant cela n'en donne pas qu'une image très négative à mon avis et place aussi son texte au delà des problèmes qui'il peut y avoir au sein de l'Eglise.
L'auteur a aussi une réflexion sur le pardon :
Car tout est là, dans cette escroquerie, dans cette mystification. Le pardon permet l'infamie. Le pardon autorise toutes les abominations. Il est la semence du mal. L'épine du monde. "Je vous le dit en vérité, tous les péchés seront pardonnés aux fils des hommes, et les blasphèmes qu'ils auront proférés." Marc 3.28
Le titre se situe à deux niveaux : le père et le Père où la majuscule finalement n'est peut être pas si bien placée.
J'ai particulièrement aimé comment Grégoire Delacourt
a mis en mots et en maux tous les sentiments de ce père
a mis en mots et en maux tous les sentiments de ce père
devant les violences faites à son fils.
Un livre comme un uppercut, qui vous coupe la respiration
dans la stupéfaction de l'indicible dévoilé.
Un roman fort qui m'a profondément marqué et bouleversé.
"Ce monde ne sera guéri que lorsque les victimes seront nos Rois."