jeudi 31 octobre 2019

Mon Père Grégoire Delacourt



Ce monde ne sera guéri que lorsque les victimes seront nos Rois.
Je me suis toujours demandé ce que je ferais si quelqu'un attentait à l'un de mes enfants. Quel père alors je serais. Quelle force, quelle faiblesse. Et tandis que je cherchais la réponse, une autre question a surgi : sommes-nous capables de protéger nos fils ? Grégoire Delacourt
Mon avis :


Une lecture comme un cri, une lecture qui crache l'abject ! Une lecture empruntée à la bibliothèque de ma meilleure amie.


Craignant de commencer ce livre mais voulant aussi le lire, j'ai été finalement vite harponnée par cet écrit. 

On sent dans cette histoire toute la détresse d'un homme, un père qui a dû gérer et encaisser l'indicible que son fils Benjamin a subi de la part d'un Prêtre. 

Stupéfaction et violence, réactivité à se faire justice. Tout m'a profondément touché dans ce livre ... 

" Mais le justice n'est pas faite pour les victimes. La justice n'est pas ce qui est juste. Elle ne répare pas. Elle n'a pas d'enfants. "

L'histoire est placée dans le milieu religieux. Les réactions de ce père (sans le P majuscule) Edouard se comprennent. J'étais à ses côtés. Lui qui voulait entendre à s'en arracher le cœur ce que son fils a subi.

" Je ne sais pas pourquoi je veux entendre cela. Recevoir chaque mot comme un coup de couteau dans le ventre, au visage et dans le cœur.Laisser chacune de ses phrases me saigner comme un port, me vider de mes larmes. Je veux tous ses mots afin de circonscrire le champ de l'horreur. Pour ne plus avoir d'ombres à imaginer, plus d'obscurités à redouter. Je ne veux nul recoin possible? Nulle pierre sous laquelle pourrait encore se cacher un lambeau de peau, une rognure d'ongle, une trace de sperme. le moindre soupir. la moindre langue. je veux jusqu'à son dernier mot, comme on extorque un dernier souffle.

"Toi, Delaunoy, ogre des aulnes, mon couteau va te pénétré comme tu as pénétré mon fils, te déchirer le ventre comme tu as déchiré le sien. Le mal que tu lui as fait doit t'être rendu car la justice est l'équilibre. Elle ne peut être que le contrepoids du mal - faute de quoi elle ferait des victimes des errants sur la Terre."

Car le silence dans ces situations est bien le plus destructeur et le plus violent de tout. Pour les victimes et les personnes autour qui très souvent ne voient rien... Ne peuvent en vérité imaginer pareilles violences. 

Oui, comment imaginer ce pire, comment, après la stupéfaction gérer tout ce que ça engendre ? ...


Un revirement en toute fin se trouve là comme pour nous inquiéter davantage de la gestion de toutes ses affaires au sein de l'Eglise.  Mais ce revirement nous donne également à réfléchir sur les différentes personnes œuvrant au sein de l'Eglise ... L'écrivain en faisant cela n'en donne pas qu'une image très négative à mon avis et place aussi son texte au delà des problèmes qui'il peut y avoir au sein de l'Eglise. 

L'auteur a aussi une réflexion sur le pardon :

Car tout est là, dans cette escroquerie, dans cette mystification. Le pardon permet l'infamie. Le pardon autorise toutes les abominations. Il est la semence du mal. L'épine du monde. "Je vous le dit en vérité, tous les péchés seront pardonnés aux fils des hommes, et les blasphèmes qu'ils auront proférés." Marc 3.28 

Le titre se situe à deux niveaux : le père et le Père où la majuscule finalement n'est peut être pas si bien placée. 

J'ai particulièrement aimé comment Grégoire Delacourt 
a mis en mots et en maux tous les sentiments de ce père 
devant les violences faites à son fils. 

Un livre comme un uppercut, qui vous coupe la respiration 
dans la stupéfaction de l'indicible dévoilé.

Un roman fort qui m'a profondément marqué et bouleversé.

"Ce monde ne sera guéri que lorsque les victimes seront nos Rois."


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mardi 22 octobre 2019

L'homme de Constantinople de J.R. Dos Santos



Quelle est cette force qui peut porter un homme jusqu’aux sommets du pouvoir ? Comment un jeune Arménien, né peu avant le déclin de l’Empire ottoman et les prémices du génocide, a-t-il pu devenir l’homme le plus riche du monde, régnant sur le monde naissant du pétrole pendant plus d’un demi-siècle ? Et pour quelle raison cet homme d’affaires intraitable, surnommé « Monsieur 5 % », devient-il le plus grand collectionneur d’art de tous les temps ?Alors qu’il est sur le point de rendre l’âme, c’est à son fils que ce multimillionnaire si secret va tenter d’expliquer ce qui l’a toujours fait avancer. Cette question qui l’a poursuivi toute sa vie et qu’il pose une dernière fois : " Qu’est-ce que la beauté ? ».
Inspiré de la vie de Calouste Gulbenkian, L’Homme de Constantinople relate le parcours exceptionnel de cet Arménien méconnu qui a pourtant régné sur la géopolitique mondiale – et consacre définitivement J.R. dos Santos comme l’un des grands auteurs contemporains. SOURCE ÉDITIONS HERVÉ CHOPIN


Mon avis :






Lors de la Masse Critique du 11 septembre 2019, j'ai postulé pour plusieurs titres et j'ai coché celui-ci pour plusieurs raisons :

- Attirée tout d'abord pas la couverture et la photo de cette magnifique broche de Femme Libellule de René Lalique que j'ai eu la chance de voir à la Fondation Calouste Gulbekian à Lisbonne.





René Lalique (1860-1945)

Femme Libellule,
Vers 1897-1898
Ornement de corsage en Or, Email, Chrysoprase, Pierres de Lune et Diamants
23 x 26,5 cm
Calouste Gulbenkian Fondation, Lisbonne


@Didi Lisbonne Avril 2018

J'étais donc intriguée de découvrir la vie de ce millionnaire qui a rassemblé tant de richesses dans ce musée extraordinaire.

Autre raison d'avoir postulé pour ce livre, la ville légendaire de Constantinople et de toute la richesse de cette ville que j'ai eu aussi la chance de visiter.

J'étais donc très heureuse d'avoir obtenu ce livre, merci à Babelio et aux éditions Hervé Chopin et j'étais curieuse de découvrir la vie de Calouste Gulbekian. 

Le livre débute avec la mort  de Calouste Gulbekian et dans la fiction de JR Dos Santos ce sont les mémoires que le père à laisser à son fils Krikor qui vont nous permettent de découvrir la vie de cet homme.


Nous remontons le temps en découvrant l'enfance de Calouste dans une première partie s'intitulant "L'Orient" .



"La vie est l'enfance de notre immortalité " Goethe

Né à Trézibonde de parents arméniens, ils vont très vite s'installer à Constantinople, ville de tous les possibles. 


L'enfance de Calouste n'est pas forcément très douce et même si le niveau de vie de la famille est aisée, leur condition d'Arménien chrétien va vite être un problème au sein d'une communauté essentiellement musulmane. 


Son père est extrêmement exigeant, Calouste doit viser la perfection et jamais se contenter d'être deuxième et encore moins d'être moyen ! Nous comprenons que cette enfance exigeante va façonner un homme certes intelligent mais très dur !


J'ai aimé cette première partie à la découverte de son enfance et de l'histoire des arméniens à Constantinople. (l'histoire se répète encore...). 


Par contre si l'enfant qu'il était m'a attirée, j'ai beaucoup moins aimé l'homme qui en est né.


Non, avouons que cet homme ne m'a pas charmé, loin de là ! Toute sa vie est tournée vers sa réussite sociale et les moyens pour y parvenir me sont apparus quelque peu détestables. 


Se marier pour obtenir uniquement un rang dans la "bonne" société. Une vision de la femme dégradante (certes lié fortement à l'époque mais quand même ... Même si le milieu des affaires actuellement n'est peut être pas encore si éloigné de ça...).


Ainsi, si j'ai aimé suivre l'enfant, j'ai eu beaucoup plus de mal à m'attacher à cet homme froid et calculateur à bien des niveaux. 


Côté sentiment on ne peu que rester en manque. Calouste finira par se marier et avoir un fils , Krikor. Calouste reproduira l'éducation qu'il a eu... Krikor prendra-t-il le même chemin que son père...


Dans l'homme de Constantinople on se retrouve au cœur de tractations politico-financières. Nous sommes aussi en pleine évolution d'un monde qui va prendre le virage du pétrole.


Comme je l'ai indiqué au début de mon billet je pensais trouver ici des réponses quant à la naissance de ce collectionneur d'art. Si nous en avons les prémices ici c'est avant tout dans ce livre la construction de cet homme qui va devenir millionnaire. 


Mes réponses se trouveront dans le tome suivant annoncé en fin de livre : " Une millionnaire à Lisbonne ".


Mon avis sur cette lecture est mitigé. Si le première partie du livre, les deux autres (le livre compte trois parties) m'ont plus ennuyées. Toutes les tractations financières et politiques en compagnie d'un homme qui se révèle dur et calculateur et ceci dans tous les domaines.


Un rapport aux femmes répugnant, avec une épouse qui est seulement une dote et un rang social et des maîtresses qui sont des femmes achetées à coup de diamants pour raison de santé et écartées quand trop vieilles (au dessus de 18 ans !). Ici pas de sentiments d'amour... La beauté n'est que matérielle chez lui en somme ? 


Un homme pour qui acheter et obtenir restent l'essentiel de sa vie.


L'écriture de JR Dos Santos est néanmoins agréable et visuelle et j'ai apprécié me promener en plein Constantinople ou en voyage à bord de L'orient express.



"Si la planète était le firmament, Constantinople serait la plus brillante des étoiles, si resplendissante et éblouissante était sa lumière. L'élève le découvrit en se promenant au bord de l'eau, jusqu'au pont de Galata où il s'attarda presque une heure, enivré par la vie qui palpitait autour de lui."

 J'espère que le deuxième tome nous révélera un homme plus humain ...



" A quoi ne forces-tu pas le cœur de l'homme, maudite soif de l'or ?" Virgile 

Merci encore à Babelio et aux Éditions Hervé Chopin pour ce cadeau !



mercredi 2 octobre 2019

Une année en Provence Peter Mayle


Lassés des  brumes londonniennes, Peter Mayle et sa femme sont tombés amoureux d'un village du Lubéron. Ils décident d'y faire restaurer un mas. Un véritable parcours du combattant commence où ils vont être confrontés au maquis de la bureaucratie, à l'inertie des entrepreneurs, à l'extrême chaleur, au plaisir de repas trop bien arrosés...Au fil des saisons, il va découvrir une ethnie, joviale, hâbleuse, généreuse, farceuse et tant soit peu feignante, qui sacrifie tout aux réjouissances de la bonne chère et du pastis, en pimentant ses échanges d'un étrange patois...
Ce livre délicieux et très drôle intègre de multiples scènes cocasses dans un beau chant pour le pays de Pagnol.

Mon avis : 


Ce livre je l'ai aussi acheté (comme le précédent) à la vente brocante de la médiathèque de ma ville. Cette année encore j'ai fait une sacrée razzia de livres à petits prix 10 livres pour un total de 11 euros c'est cool.





A la base quand j'ai choisi ce livre je me suis trompée sur l'auteur je pensais à Peter May, deux lettres et ça fait la différence :O). Ce livre là me plaisait aussi en tant qu'objet avec sa couverture rigide son marque page ruban et la reproduction d'un tableau de Paul Cézanne représentant la montagne de la Sainte Victoire et même la couverture cartonnée est sympa un peu " old school " mais j'aime bien. Imprimé en 1995 pour le compte de France Loisirs.




Peter Mayle décrit avec ce livre sa propre expérience d'installation d'un anglais en France et plus particulièrement en Provence avec sa femme. 

J'ai fortement apprécié sa vision d'une partie de la France et son humour à bien marché chez moi. J'ai donc passé un très bon moment en compagnie de ce couple d'anglais (sa femme est assez effacée dans ses propos) et j'ai eu très souvent le sourire au coin des lèvres.

Mon livre est truffé de pages cornées (ah ben bravo ne pas prendre soin de ses livres...). C'est Peter Mayle qui parle et s'il décrit des habitudes pas très agréables c'est toujours finalement avec un certain humour façon "pince sans rire" et aussi avec une certaine tendresse et complaisance avec les personnes qu'ils croisent. C'est de la critique mais toujours tendre et jamais bien méchante même quand nous serions énervés devant tant d'inertie par rapport aux travaux ! Le flegme britannique peut être ...

"Les travaux de construction étaient rares alors en Provence et, qui sait, une période de marasme pourrait toujours revenir ? On accepte donc toutes les commandes, et les clients qui ne restent pas vigilants se retrouvent avec des bétonneuses assoupies et des chambres inachevées. Devant cette situation, il y a deux réactions possibles. Nous essayâmes les deux. Tout d'abord, nous fîmes un effort considérable pour adopter une attitude plus philosophique vis-à-vis du temps, pour traiter à la provençale les jours et les semaines de retard : autrement dit profiter du soleil et cesser de voir les choses comme les gens de la ville. Ce mois-ci ou le mois prochain, quelle différence ?"

Vivre au gré des saisons et des 12 mois de l'année voilà ce qui fait le charme de cette installation en Provence. Une vraie ode à la nature et à la gastronomie, les deux étant fortement liées. Ce livre éveille les papilles comme celle de Peter Mayle.

"Nous commandâmes des omelettes. Elles étaient baveuses, onctueuses et légères, avec une minuscule pépite de truffe d'un noir foncé dans chaque bouchée, apportant un ultime et somptueux goût d'hiver. Nous sauçâmes nos assiettes avec du pain en essayant de deviner ce qu'un pareil festin coûterait à Londres : nous en arrivâmes à la conclusion que c'était une véritable occasion que nous venions de dévorer. Toute comparaison avec Londres est un excellent moyen de justifier une petite extravagance en Provence."

Le raisin et le vin, les olives et l'huile, le blé et le pain, la truffe et les restaurants. Le sens de l'accueil des familles en France et en Provence.

L'auteur dresse aussi les portraits de moult personnages avec drôlerie et a-propos :

Monsieur Colombani le chauffagiste, Rivière le paysan du coin, Didier l'artisan plâtrier peintre, Amédée l'ancien paysan voisin, Tony le publicitaire anglais, Maurice l'aubergiste, Ted et Susan des amis anglais non adaptés au climat provençale ...

C'est la France de nos campagnes que l'auteur nous décrit là et à part quelques détails relatifs à cette région de Provence j'ai ressenti un attachement moi aussi à mon pays et à ma région qui reste encore paysanne, même si ce n'est plus tout à fait pareil...

La France pays de la gastronomie de la bonne chère, du vin et des fromages.

Une belle année passée en bonne compagnie avec le sourire aux lèvres.

Un livre pris au hasard finalement 
et le hasard à bien fait les choses 
car j'ai passé un bon moment de lecture.

Vous aussi laissez-vous tenter, par une année en Provence 
au côté de britanniques sympathiques. 

Même le mistral ne devrait pas vous contrarier...


"Leur visite (visite d'amis anglais pour quelques jours en Provence) nous fit comprendre quelle chance nous avions d'avoir une constitution de chèvres et des peaux qui supportaient le soleil. La routine de nos journées avait changé et nous vivions dehors. Trente secondes pour nous habiller. Au petit déjeuner, figues fraîches et melons. On faisait les courses de bonne heure, avant que la douce chaleur du soleil ne tourne à la fournaise du milieu de matinée. Les dalles autour de la piscine étaient brûlantes, l'eau encore fraîche pour nous faire sursauter au premier plongeon. Nous nous abandonnions à la pratique de ce judicieux plaisir méditerranéen, la sieste. Le port des chaussettes n'était plus qu'un lointain souvenir. Ma montre restait dans un tiroir et je constatais que je pouvais à peu près dire l'heure d'après la position des ombres dans la cour, même si je savais rarement quel jour on était. Cela semblait sans importance."

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