Werther
(au paysan)
Alors, c’est bien ici la maison du Bailli ?
(congédiant son guide)
Merci.
(seul, Werther pénètre plus avant dans la cour et s’arrête devant la fontaine.)
Je ne sais si je veille ou si je rêve encore !
Tout ce qui m’environne a l’air d’un paradis ;
le bois soupire ainsi qu’une harpe sonore,
Un monde se révèle à mes yeux éblouis !
O nature, pleine de grâce,
Reine du temps et de l’espace
Daigne accueillir celui qui passe et te salue,
Humble mortel !
Mystérieux silence !
O calme solennel !
Tout m’attire et me plaît !
Ce mur, et ce coin sombre...
Cette source limpide et la fraîcheur de l’ombre ;
il n’est pas une haie, il n’est pas un buisson où
n’éclose une fleur,
où ne passe un frisson !
O nature! enivre-moi de parfums,
Mère éternellement jeune, adorable et pure !
O nature !
Et toi, soleil, viens m’inonder de tes rayons !
Werther
(d’une voix entrecoupée sans presque regarder Charlotte; douloureusement)
Oui ! c’est moi ! je reviens ! et pourtant...
loin de vous... je n’ai pas laissé passer une heure...
un instant... sans dire:
que je meure plutôt que la revoir !
Puis... lorsque vint le jour que vous aviez fixé...
pour le retour... je suis parti !
Sur le seuil de la porte... je résistais encor... je voulais fuir !
(sans accent)
Qu’importe d’ailleurs tout cela !
(accablé)
Me voici!
Charlotte
(très émue, cherchant à se contenir et à paraître indifférente)
Pourquoi cette parole amère? Pourquoi ne plus revenir ?
Quant ici chacun vous attendait... mon père... les enfants !
Werther
(s’approchant avec une curiosité expressive)
Et vous ? Vous aussi ?
Charlotte
(coupant court aux mots qu’elle sent sur les lèvres de Werther et sans lui répondre)
Voyez! la maison est restée telle que vous l’aviez quittée !
A la revoir ainsi
(tendrement)
ne vous semble-t-il pas qu’elle s’est souvenue ?
Werther
(jetant un regard autour de lui)
Oui, je vois... ici rien n’a changé...
(tristement)
que les cœurs! Toute chose est encore à la place connue !
Charlotte
(tendrement et simplement)
Toute chose est encore à la place connue !
Werther
(va par la chambre)
Voici le clavecin qui chantait mes bonheurs
Ou qui tressaillait de ma peine.
Alors que votre voix accompagnait la mienne !
Werther
(venant près de la table)
Ces livres ! sur qui tant de fois
nous avons incliné nos têtes rapprochées!
(Allant au secrétaire sur leque est placée la boîte aux pistolets)
Et ces armes... Un jour ma main les a touchées...
(d’une voix sourde)
déjà j’étais impatient du long repos auquel j’aspire!
Charlotte
(sans voir ce dernier mouvement, est remontée vers le clavecin sur lequel elle a pris un manuscrit; puis elle redescend vers Werther)
Et voici ces vers d’Ossian que vous aviez commencé de traduire...
Werther
(prenant le manuscrit)
Traduire ! Ah ! bien souvent mon rêve s’envola sur l’aile
de ces vers, et c’est toi, cher poète,
qui bien plutôt était mon interprète !
(avec une tristesse inspirée)
Toute mon âme est là !
Pourquoi me réveiller, ô souffle du printemps,
pourquoi me réveiller ?
Sur mon front je sens tes caresses,
Et pourtant bien proche est le temps
Des orages et des tristesses !
(avec désespérance)
Pourquoi me réveiller, ô souffle du printemps ?
Demain dans le vallon viendra le voyageur
Se souvenant de ma gloire première...
Et ses yeux vainement chercheront ma splendeur,
Ils ne trouveront plus que deuil et que misère !
Hélas!
(avec désespérance)
Pourquoi me réveiller ô souffle du printemps !
Charlotte
(dans le plus grand trouble)
N’achevez pas ! Hélas ! ce désespoir...
ce deuil... on dirait... il me semble...
Werther
Ciel ! Ai-je compris ?
(plus accentué)
Ai-je compris ?
(palpitant)
Dans cette voix qui tremble, dans ces doux yeux remplis
de larmes n’est-ce pas un aveu que je lis ?
Charlotte
(frémissante)
Ah! taisez-vous !
Werther
(en s’exaltant de plus en plus)
A quoi bon essayer de nous tromper encore...
Charlotte
(suppliant)
Je vous implore !
Werther
(avec ardeur)
Va! nous mentions tous deux en nous disant vainqueurs
de l’immortel amour qui tressaille en nos cœurs !
Charlotte
Werther !
Werther
(extasié et palpitant)
Ah! ce premier baiser, mon rêve et mon envie !
Bonheur tant espéré qu’aujourd’hui j’entrevois !
Il brûle sur ma lèvre encor inassouvie ce baiser...
ce baiser demandé pour la première fois !
Charlotte
(défaillante, tombe éperdue sur la canapé)
Ah! Ma raison s’égare...
Werther
(se jetant à ses pieds)
Tu m’aimes ! tu m’aimes ! tu m’aimes !
Choix des textes sur le thème du printemps qui arrive aujourd'hui 20 mars 2014.
Vous trouverez le texte dans sa totalité sur Libretti.
à l'occasion de la répétition générale, Werther sera joué
demain vendredi 21 mars, dimanche 23 et mardi 25 mars 2014 !
Merci pour la découverte !
demain vendredi 21 mars, dimanche 23 et mardi 25 mars 2014 !
Merci pour la découverte !
Argh, ça c'est du texte! Je rigole, mais si Saint Etienne n'était pas si loin...
RépondreSupprimerCoucou Keisha,
Supprimerle texte n'est jamais très gai dans les opéras. Mais j'ai bien aimé ces deux airs et quelques autres dont deux pas du tout marrants :-S
L'Opéra théâtre de ma ville est un beau lieu !
Bisous et bon WE
Il est bien vrai que dans ces jours bénis par le Printemps , la nature est pleine de grâces...:-)
RépondreSupprimerBisous soleil du jour Didi
Bonsoir Mathilde,
Supprimerj'ai trouvé que ce texte était un bien bel hommage à dame nature ♥
Bisous pour ce WE où le soleil semble être un peu fatigué.... :-S
Joli choix ! Merci pour le partage
RépondreSupprimerBonjour :)
SupprimerDe rien pour le partage ce n'est que quelques extraits qui m'ont marqués !
Bisous et bon WE