samedi 6 février 2021

Buveurs de vent Franck Bouysse


 
Ils sont quatre, nés au Gour Noir, cette vallée coupée du monde, perdue au milieu des montagnes. Ils sont quatre, frères et sœur, soudés par un indéfectible lien. Marc d’abord, qui ne cesse de lire en cachette. Mathieu, qui entend penser les arbres.
Mabel, à la beauté sauvage. Et Luc, l’enfant tragique, qui sait parler aux grenouilles, aux cerfs et aux oiseaux, et caresse le rêve d’être un jour l’un des leurs. Tous travaillent, comme leur père, leur grand-père avant eux et la ville entière, pour le propriétaire de la centrale, des carrières et du barrage, Joyce le tyran, l’animal à sang froid...

Mon avis :

Lecture grâce à la Médiathèque Numérique de la Loire sur ma tablette car je n'arrive pas à transférer mes prêts sur ma liseuse ...

Une lecture qui fait penser à un conte avec l'écriture si particulière de Franck Bouysse dont j'avais absolument adoré  "Né d'aucune femme" (Vous pouvez cliquer sur le titre pour voir mon avis ravi).

L'écriture de l'auteur, est toujours poétique, puissante, instigatrice de sentiments de l'amour, de la mort, du temps qui passe et des hommes.

" Pour témoigner de ce qui arrive ensuite, il faudrait peindre le silence avec des mots, même si les mots ne suffiront jamais à traduire une réalité, et ce n'est pas nécessaire. Il faudra pourtant . Témoigner du dérisoire et du sublime." 

Ici on intègre une famille qui s'avère dès le départ très bancale. Seule la fratrie est soudée.

" Quatre ils étaient, un ils formaient, forment et formeront à jamais."

J'ai retrouvé ce que j'ai aimé dans Né d'aucune femme et ce style si particulier, poétique et proche de la nature qui sait retranscrire des émotions, vibrer les sentiments. Prix Jean Giono 2020 ce livre le mérite amplement dans ce qu'il nous plonge dans cette nature immense et merveilleuse.

" Dans la forêt, la source de la vie était précisément la mort de tout. Elle se nommait humus, un lit dans lequel naissaient d'innombrables racines, s'enfonçant, chevauchant, butant, contournant, perforant, un lit dans lequel vadrouillaient les formes primales, disparaissant en profondeur, au fur et à mesure que l'oxygène venait à manquer ; un lit dans lequel ma méticuleuse et opiniâtre décomposition de la mort conduisait à la vie ; un lit dans lequel se réveiller et s'endormir."  

Ce livre parle de beaucoup de choses : De la famille, de la fratrie, de l'enfance mais aussi du monde du travail et de celui des despotes qui imposent leur loi.

Les 3 frères et la sœur sont soudés et traversent des tempêtes. La belle Mabel ne s'en laisse pas conter et assume ses désirs et sera ainsi chassée par sa mère bigote invétérée ... A la grande déception de ses trois frères et de son grand-père qui n'auront de cesse qu'elle revienne dans la sphère familiale ...

La vie familiale se mélange à la vie de travail. Le conte familial devient plus social avec la révolte qui finie par gronder dans cet univers cadenassé et trop prévisible...

S'affranchir des lois, s'affranchir des habitudes, s'affranchir de réduit les libertés. Le combat gronde.

" Eux qui s'étaient toujours satisfaits de l'ici se rendaient là bas vers quelque idéal jusqu'alors inconcevable, eux qui avaient toujours marché en petits groupes avançaient désormais en rangs serrés. Géométrie de combattants. Ils allaient résolument, chacun soutenu par tous les autres, en une forme de courage grégaire, qui veut que le nombre fait croire que l'on aura toujours quelqu'un sur qui compter, sans redouter un seul instant que ce quelqu'un c'est seulement nous même".

Je dois vous dire que j'ai pourtant moins appréciée cette lecture que celle de "Né d'aucune femme". 

Alors, non pas du tout une déception loin de là,  mais une écriture faite de plus de dialogues,  et un peu découpée, dans le sens ou nous pouvions avoir finalement deux histoires distinctes : celle au cœur de la famille et celle dans l'usine de Joyce. 

Et puis j'ai été un peu frustrée par la fin qui m'a semblée un peu trop rapide ...

Mais bon tout est relatif, car c'est une lecture qui me reste en tête avec des images et des sensations encore maintenant. Une belle lecture !

J'ai apprécié les personnages riches et sauvages et toujours un peu fantasmés. J'ai apprécié  les chemins qu'ils ont pris et ce qu'ils ont finalement appris ...

Et puis ce titre "Buveurs de vent" je le trouve extraordinaire  ! Magnifique ! Une bonne synthèse de ce que Franck Bouysse sait nous transmettre dans son écriture.

" Ils s'assirent sous la vaste paupière maçonnée , serrés les uns contre les autres, dessinant à eux quatre l'iris de l'œil d'un cyclope inscrit dans la pupille laiteuse du ciel, toujours en leur royaume échappant ainsi à une destinée cartographiée de longue date par les adultes. Ils inspiraient fort et buvaient le vent qui montait dans la vallée, le recrachant en relents de tempête, sous leurs crânes d'enfants."

Je vous souhaite une belle lecture 

en compagnie de ces buveurs de vent qui méritent votre intérêt !

Portez-vous bien et continuez de lire,

une liberté pas prête d'être supprimée et c'est tant mieux !!!


"On embrasse, on acclimate, on déraisonne, on raccommode, on s'accommode, on saisit, on repousse, on met, on fait ce que l'on peut et on finit par croire que l'on peut. On veut faire croire aux hommes que le temps s'écoule d'un point à un autre, de la naissance à la mort. Ce n'est pas vrai. Le temps est un tourbillon dans lequel on entre, sans jamais vraiment s'éloigner du cœur qu'est l'enfance, et quand les illusions disparaissent , que les muscles viennent à faiblir, que les os se fragilisent, il n'y a plus de raison de ne pas se laisser emporter en ce lieu où les souvenirs apparaissent comme les ombres portées d'une réalité évanouie, car seules ces ombres nous guident sur cette terre."

 

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6 commentaires:

  1. Jamais lu l'auteur (même pas Né d'aucune femme ^_^)

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    1. Bonsoir Keisha,
      et bien si moi je me met à compter les auteurs pas encore lu ... En tout cas j'aime l'écriture de Franck Bouysse.
      Bisous

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  2. je l'ai préféré à Plateau et donc vraiment beaucoup aimé...

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    1. Bonsoir Violette,
      il me reste des livres de Bouysse et j'en suis heureuse !
      Bisous

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  3. Un livre qui m'était tombé des mains, je n'avais accroché à rien.

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    1. Bonsoir Alex,
      un livre avec moins de liant mais une écriture qui me fascine toujours pour ma part.
      Bisous

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