"L'Oral et Hardi" de Jean-Pierre Verheggen

"Le comédien Jacques Bonnaffé, que les Stéphanois retrouveront cette saison dans Le Problème, s’empare pour les « livrer à la scène » de plusieurs textes du poète belge Jean-Pierre Verheggen, surnommé quelquefois « le Rabelais du nord ». Des extraits d’ œuvres aux titres aussi truculents qu’elles-mêmes (Artaud Rimbur, Entre St antoine et San antonio / Manifeste cochon, Portrait de l’artiste en castafiore catastrophique, etc.), composent ce spectacle.
L’Oral et Hardi est le « discours de campagne d’un éventuel non candidat probable, parcours entamé au gré des festivals d’été, prolongé en soirées concerts jusqu’à devenir allocution poétique ». En une parodie des plus sérieuses, qui tient à la fois de l’art du clown, du slam et du pastiche politique, Jacques Bonnaffé fait jongler les phrases dans un enchevêtrement fou de calembours et de lapsus toujours révélateurs.
Avec une énergie débordante, assortie d’un art délicat de la nuance, il se livre à un combat de boxe verbal, jubilatoire. Dans sa bouche, les mots de Verheggen, au mépris de la poésie bien pensante et des académismes de tout poil, nous invitent à prendre d’assaut notre langue et à la chérir immodérément."

  

« La langue m’échappe depuis toujours. Je n’arrive pas à la saisir. Je confonds tout : Freud et Fred, le danseur de claquettes, ou aujourd’hui Tintin et Desmond Tutu, Madame Bovary et Monsieur Bovidé. Ou Tirésias et Mamelle, j’en passe et des plus belges ». Jean-Pierre Verheggen

Mon avis : 

Un spectacle vu à la comédie de Saint-Étienne vendredi 27 avril, mon dernier pour cette saison, je renouvellerais l'expérience l'année prochaine, Comédie me voilà !

L'oral et hardi est un monologue difficilement identifiable, une espèce d'ovni oralien (moi aussi je peux inventer des mots ).

On rit beaucoup, enfin j'ai beaucoup rigolé et j'ai été encore une fois stupéfaite du jeu d'acteur et surtout de sa diction et de son énumération sans failles, une mémoire d'éléphant. Le texte n'est pas forcément simple à apprendre, des listes dithyrambiques, des discours, des poésies détournées. Un vrai marathon des mots ! Jacques Bonnaffé à le sens du rythme et des mots et tel un marathonien du discours il nous emballe avec lui, dans les jeux de mots et dans la musique de la langue, avec bonheur humour et décalage.

Je ne connaissais pas Jean-Pierre Verheggen et la découverte de cette pièce m'a amenée à rechercher (merci internet) d'autres textes de lui et c'est foisonnant et décalé, j'aime ! Je vous invite à le découvrir !

Quelques extraits 

« Rappeurs, slameurs, encore un effort pour être poètes !

C’est d’autant plus vrai que personne ne cherche à vous en empêcher ! Au contraire ! Parlez ! Parlez même d’abondance ! Chattez, salmez, tchatchez, rappez en cadence, breakez en transe – que sais-je ? – exprimez vos différences ! Y compris celles qu’il y a entre ces différents genres !

(...)

Parlez verlan si ça vous chante mais parlez verlan comme l’aurait fait Paul Verlaine en son temps, parlez-en en poètes, parlez en Paul verlan tant qu’à faire ! Crezusez-vous la tête ! «Écrivez ! Insistez ! Récrivez ! Bossez d’arrache-vers et d’arrache-pied tout en faisant de la langue un travail et une fête ! Tout en exubérance autant qu’en patience ! (...) »

" Relisez Céline ! Relisez Celan ! Relisez le Ceux qui merdRent de Prigent ! Phonez, jeunes gens ! Languez ! Ironisez ! Vous n'ironiserez jamais assez ! Écrivez entre saint Antoine et San Antonio ! Utilisez vos propres mots ! En avant : tout à l'Ego ! Envoyez Zacadémi dans l'métro ! Apprenez même à paraître toujours plus idiots ! Mais idiots comme Idionysos ! Ce sera votre force ! Soyez joyeusement désespérés ! "

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