jeudi 17 février 2022

" La chienne " Pilar Quintana



La chienne

Sur la côte pacifique colombienne, entre océan déchaîné et jungle menaçante, vivent dans un cabanon de fortune Damaris et son mari pêcheur. Si elle est mélancolique, ce n’est pas à cause de son existence précaire : Damaris n’a jamais réussi à tomber enceinte et elle en souffre de plus en plus.
Alors, quand elle adopte un chiot sur un coup de tête, l’animal devient une source infinie d’amour qu’elle va choyer sans relâche dans cet univers si hostile. Mais un jour, la chienne disparaît, plongeant Damaris dans un immense désarroi.
Une exploration féroce et bouleversante du désir maternel. Une lecture choc qui dépayse autant qu’elle bouscule. Source Éditions J'ai Lu  



Mon avis :

Ce petit livre de 153 pages a été lu avec plaisir et rapidité. Nous sommes presque dans le format d'une nouvelle.

J'ai accroché tout de suite à cette histoire qui nous parle du désir d'enfant, des liens d'attachement entre un animal et un humain, tout ça au cœur d'une nature sauvage et dure.

C'est Damaris le personnage principal de cette histoire et pour elle la vie n'a jamais été vraiment facile. La nature ne l'a jamais gâtée. Des épisodes douloureux dans son enfance vont la marquer à jamais et son désir de mère, une fois adulte, ne sera jamais combler.

Ce n'est pourtant pas faute d'avoir essayer et d'avoir mis toutes les chances de son côté avec son mari Rogelio. Un homme qui nous parait rustre au départ mais qui ne l'est pas vraiment.

" Le chamane vit Damaris pendant longtemps. Il lui donna des boissons, lui prépara des bains et des encens, et l'invita à des cérémonies au cours desquelles il la baigna, la frotta, la plongea dans des nuages de fumée et des bains d'huiles, lui psalmodia des prières et lui murmura des chansons. Ensuite ce fût au tour de Rogelio, qui, cette fois ne fit pas la tête ni ne baissa les bras. Et tout celà n'était que les préparatifs. Le traitement en tant que tel consistait en une opération que Damaris devait subir, mais sans être ouverte d'aucune manière. Il s'agissait juste de nettoyer les espaces qui devaient accueillir son œuf et le sperme de Rogelio et préparer le ventre pour recevoir le bébé.  Le tout était très coûteux et ils durent économiser durant toute une année pour pouvoir se le payer."

Alors l'arrivée de cette chienne dans la vie de Damaris va révéler en elle, la mère qu'elle n'a pas été.  Le prénom donné à la chienne est celui qu'elle aurait donné à une fille: Chirli.

On voit alors Damaris devenir mère, on la voit nourrir, langer, nettoyer, chérir la petite chienne. On va aussi très vite la voir s'inquiéter aussi quand la chienne va disparaitre une première fois.

" Face à elle, il n'y avait que la jungle, silencieuse, tranquille comme un monstre qui vient d'avaler sa proie. Damaris retourna à la cabane, mis ses grandes bottes de caoutchouc, prit la machette et la lanterne, et s'avança dans les broussailles, dans la direction des chiens. A aucun moment elle n'eut peur de tout ce qui l'effrayait habituellement dans cette jungle : l'obsurité, les équis, les bêtes sauvages, les morts, les défunts Nicolasito, Josué et le senor Gene, les fantômes dont elle avait entendu enfant... Elle ne s'étonna pas non plus de son courage. Elle ne pensait qu'à une seule chose : le chienne était en danger et elle devait la sauver."

Puis, la chienne va devenir adulte et elle va alors devenir fugueuse et mère à son tour.... Ce qui va profondément bouleverser Damaris...

"Damaris ne pleura plus la perte de la chienne, mais son absence lui pesait dans la poitrine comme une pierre. Elle lui manquait tout le temps. Quand elle rentrait du village et qu'elle n'était pas en haut de l'escalier à l'attendre, la queue battante, quand elle préparait le poisson et qu'elle n'était pas là à la regarder avec insistance, quand elle jetait les restes sans garder le meilleur pour elle ou quand elle buvait le café le matin et n'avait personne à qui caresser la tête."

Ce livre est une petite pépite d'émotions où dans un court espace Pila Quintana nous parle de maternité, de mal de vivre, d'amour, tout ceci dans le décor sauvage et rugissant de la côte océanique Colombienne. 

" Cette jungle est terrible, explique-t-elle. Il y avait beaucoup trop de falaises comme celles-ci, avec des rochers recouverts de mousse glissante et des vagues comme celle sui avait emporté le petit Nicolasito, des arbres immenses que les éclairs coupaient en deux, des glissements de terrains, des couleuvres venimeuses ou capable d'avaler un cerf, des chauves-souris qui saignaient les animaux, des plantes avec des épines qui pouvaient transpercer un pied, et des ruisseaux puissants qui naissaient après les averses et dévastaient tout sur leur passage..."
Il va résonner longtemps en moi ce petit livre et je vous invite à le découvrir et ainsi mieux connaitre Damaris et la chienne. 

Une pépite qui se dévore comme l'océan dévore les falaises de la côte bolivienne.

Je remercie sincèrement Babelio et les Editions J'ai Lu pour ce partenariat lors d'une masse critique Littérature (Masse critique qui a lieu à 7 heure du matin ce qui me convient tout à fait).



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lundi 14 février 2022

De l'or dans les collines C Pam Zhang

 

















Au crépuscule de la ruée vers l’or, deux sœurs traversent les États-Unis avec les restes de leur père et un fusil pour tout bagage…

Lucy et Sam, filles d’immigrants chinois, sont désormais orphelines. Ma est partie depuis un moment, Ba vient de mourir dans la nuit. Les deux fillettes livrées à elles-mêmes entament alors un long périple au cœur d’une nature inhospitalière, peuplée d’individus agressifs et souvent racistes, à la recherche de l’endroit idéal pour enterrer leur père. L’une est raisonnable et avide de connaissances, l’autre arbore et assume une identité de garçon, refusant de se plier aux règles du monde. Très vite hors-la-loi dans un univers qui ne veut pas d’elles, Lucy et Sam vont se confronter au rêve amer de l’Ouest américain, portées par leur imaginaire où se mêlent tigres et bisons géants.

C Pam Zhang est née en 1990 à Beijing, en Chine, puis est arrivée aux États-Unis à l’âge de quatre ans. Elle a étudié à la Brown University, à Providence et à Cambridge. Ses nouvelles ont paru dans The New YorkerThe New York TimesMcSweeney’s QuaterlyBest American Short Stories, entre autres. Son premier roman, De l’or dans les collines, a été nominé dans plus de dix prix littéraires aux États-Unis, dont le Booker Prize, et a déjà été traduit dans dix-sept pays.

Source les Editions Seuil


Bonjour Didili,

Je me permets de vous écrire pour vous rappeler que j'attends avec impatience votre critique du livre De l'or dans les collines que vous avez reçu dans le cadre de Masse Critique.

Les éditeurs risquent de ne plus nous faire confiance et de ne plus proposer de livres pour Masse Critique si les membres ne jouent pas le jeu et ne publient pas leurs critiques dans le temps imparti.

N'hésitez pas à me contacter si vous rencontrez des problèmes dans la rédaction de votre chronique.

Merci et à bientôt,
Cordialement,

PIERRE KRAUSE

Mon avis : 

Désolée, oui vraiment je suis désolée pour cet important retard dans cette lecture.

Livre partenariat d'une masse critique particulière de mon cher et tendre Babelio (bonne Saint Valentin à lui ♥) et des éditions Seuil.

Merci à vous pour la confiance accordée et pour laquelle ce retard ne jouera pas en ma défaveur... Alalalalala le temps, la course contre la montre, les retards... Bref, je m'aviserais d'être plus respectueuse la prochaine fois.

Voilà enfin mon avis, il arrive en même temps que les vacances d'hiver, déjà là, mais qui sont toujours les bienvenues après cette période où la pandémie, la fatigue et un autre livre adoré ont  accaparé mon temps…

Un beau titre, une belle couverture hennissante et me voilà embarquée en compagnie de deux jeunes filles qui fuient... Elles ont pour compagnie dans une malle, le cadavre de leur père.

" Qu'est-ce qui fait un homme ? Elles font basculer la malle. est-ce un visage à montrer au monde ? Des mains et des doigts pour le façonner ? Deux jambes pour le parcourir ? Un coeur qui bat, des dents et une langue qui chantent ? A Ba, il ne reste plus grand chose de tout cela. Il lui manque même la forme d'un homme. Il a la forme de la malle comme le ragoût celle de la casserole."

Nous sommes dans l'ouest américain, l'ambiance est posée par la décor et les sensations. On va suivre ces deux jeunes filles  aux origines chinoises,  mais nées sur le territoire américain.

Nous sommes dans l'ouest, celui de la ruée vers l'or, de cet or dans les collines qui n'est plus vraiment là...

Il y a 4 périodes dans le livre nous permettant d'explorer ainsi, le passé, le présent, le futur et l'au-delà dans l'histoire de cette famille d'immigrés chinois.

C Pam Zhang rend très bien les atmosphères, les paysages, les sensations ressenties par Lucy et Sam. 

L'auteure pointe la difficulté pour des personnes venues d'ailleurs de trouver leur "chez soi".

Le racisme est ici d'autant plus présent que la quête de l'or devient de plus en plus dure et que la violence se porte sur les gens différents, même si ceux-ci sont nés dans ces collines, même si ce sont eux qui ont arrachés à la sueur de leurs fronts et aux calles de leurs mains l'or de ces collines. La difficile vie des immigrés qui est toujours d'actualité même dans notre monde moderne, peut être même encore plus.... 

"Ba serre les poings. Les hommes derrière lui se rapprochent ,commencent à hurler. Tu ne sais pas compter, mon gars ? Dis plutôt que tu n'y vois rien. Pas avec ces yeux là !  Quelqu'un dit : Autant essayer de faire entrer une vache dans un citron. "

La conquête de l'or ne s'accommode pas de philosophie et de compréhension surtout quand les collines on déjà été ratissées jusqu'à la moëlle.

Lucy, Sam, Ma et Ba leurs parents nous transportent dans cette conquête que tous un chacun porte en soi.  La recherche d'un "chez soi" sans manque, grâce au travail et en paix avec tout le monde.

Une construction originale et entrainante mais dont l'écriture a pu me perdre par manque de fluidité et que j'ai eu parfois du mal à intégrer. Un sentiment d'écriture saccadée qui a retardé ma lecture...

Il me reste toutefois de bonnes impressions dans le sens où l'auteure a réussi à m'intéresser au sort de ces deux jeunes filles, à mieux comprendre d'où elles venaient et ce que l'époque leur permettait de réaliser (ou pas). De plus C Pam Zhang sait créer des atmosphères et nous faire ressentir des sensations avec justesse.

"Le soleil brûle ; l'eau abandonne Lucy a une vitesse stupéfiante. Où est-elle passée, toute cette eau perdue ? Un lac peut-il sans enterrement digne de ce nom, devenir un fantôme ? Un lieu peut-il se souvenir , et souffrir et fulminer contre ce qui le fait souffrir ? Elle pense que c'est possible. Elle pense : Pas moi je ne t'ai pas fait souffrir. Aide-moi.

Elle découvre un fossile de poisson, elle découvre un gros morceau de quartz. Elle découvre que l'espérance fait davantage souffrir que l'absence d'espérance."

Je m'excuse encore pour le retard pris pour cette lecture et je remercie Babelio et les Editions Seuil pour ce partenariat (honoré tardivement, mais honoré quand même).

Quant à  vous, filez dans l'or des collines 

au côté de Lucy et Sam dans cet Ouest 

à la conquête d'un chez soi qui vaut tout l'or du monde !

" Parce que cette contrée est une contrée de choses disparues. Une contrée dépouillée de son or, de ses rivières, de ses bisons, de ses tigres, des ses chacals, de ses oiseaux, de sa verdure et de sa vie. "